Les peintures de Giacometti, un suisse pas comme les autres
Giacometti, un suisse pas comme les autres, qui sculpte en peintre et peint en sculpteur, s’attache à décrire picturalement la distance absolue que les sculptures avaient instaurée entre les choses : « à ses yeux, la distance, loin d’être un accident, appartient à la nature intime de l’objet » . Mais il s’agit encore une fois de transposer l’ambivalence et la contradiction inhérentes à l’être : simplement, il se positionne de l’autre côté de cette même réalité, il la saisit sous son autre facette, soulignant ce qu’il perçoit comme une distance de la présence, là où ses sculptures nous faisaient ressentir la présence de la distance. Chacun des deux arts non-signifiants témoigne à sa manière de la rencontre entre la plénitude et le vide : mais tandis que « la sculpture crée du vide à partir du plein », la peinture permet de créer du plein à partir du vide, pour ainsi dire : « qu’est-ce donc que ce vide encadré et peuplé, sinon un tableau ? Lyrique quand il sculpte, Giacometti devient objectif quand il peint : il tente de fixer les traits d’Annette ou de Diego tels qu’ils apparaissent dans une chambre vide, dans son atelier désert » .
Portrait d’Annette, sa femme, vers 1950